Il est 11h20 lorsqu’une forte déflagration s’est produite dans la région du Lac 2. Plus exactement devant l’entrée principale de l’ambassade des États-Unis à Tunis. Un bruit tellement puissant que tout de suite, les centaines d’employés des entreprises alentour ont réalisé très vite que quelque chose de grave venait de se passer.
«C’était une terrible explosion, il ne pouvait s’agir que d’une bombe, raconte Haykel, encore tremblant deux heures après l’attentat. Certains employés ont même été pris d’une véritable crise de panique et il a fallu les calmer».
«Nous avons senti trembler les murs et les vitres», raconte encore la journaliste Manel Gharbi d’Express Fm, dont les locaux sont à proximité.
Deux terroristes chargés d’explosifs et à bord d’une moto venaient de percuter un véhicule de police posté devant l’entrée de l’ambassade. Les deux assaillants meurent sur le coup tandis que l’un des policiers succombe à ses blessures quelques heures après à l’hôpital. Il s’agit du désormais martyr de la nation, le lieutenant Taoufik Mohammed Missaoui.
Dans le viseur des terroristes, certainement un lieu hautement symbolique, l’ambassade des Etats-Unis en Tunisie. Mais selon les premiers éléments de l’enquête, les deux assaillants savaient pertinemment qu’ils ne pouvaient pas se faire exploser à l’intérieur de l’ambassade, en témoigne le fait qu’ils se sont directement dirigés vers la patrouille de police postée, il est vrai, à quelques mètres de la représentation diplomatique.
Lorsque les journalistes arrivent sur place, la police a déjà bouclé la scène de crime. Pourtant, à y voir de plus près, ladite scène semble difficile à identifier.
À notre arrivée, derrière les rubans de police, nous sommes surpris de trouver à même le sol des restes humains éparpillés un peu partout à plus de 200 mètres du lieu de l’explosion. Il s’agit de morceaux de chair des deux assaillants. «Nous avons même dû éloigner un chien venu flairer un morceau de chair humaine calcinée», nous confie l’un des policiers qui assurent la sécurité de la scène de crime.
«La charge explosive était tellement puissante que nous avons retrouvé des restes humains au-dessus de l’un des bâtiments à plus de 200 mètres du lieu de l’explosion», explique le médecin légiste, le docteur Moncef Hamdoun, dans une déclaration au journal La Presse.
Plusieurs heures après l’attentat-suicide, les membres de la police scientifique, vêtus de blanc, continuaient à ratisser les moindres recoins de la scène de crime à la recherche d’indices qui pourraient faire avancer l’enquête.
«Nous avons prélevé de l’ADN sur les corps déchiquetés des deux individus et nous serons probablement demain (aujourd’hui) en mesure de les identifier d’une manière certaine», déclare le docteur Hamdoun.
Bilan final de cette opération terroriste désespérée, un policier mort et cinq blessés légers, dont une femme, sous le choc. Quelques minutes après l’attentat, l’ambassade américaine à Tunis se contente d’un court communiqué à l’adresse des citoyens américains et des employés de l’ambassade. «Le personnel d’urgence a répondu à l’explosion qui s’est passée près de l’ambassade des Etats-Unis. Merci d’éviter la zone et de continuer à suivre l’actualité dans les médias locaux».
Ce n’est que dans la soirée que finalement l’ambassadeur des Etats-Unis, Donald Blome, sort de son mutisme et remercie, dans un message publié sur la page Facebook de l’ambassade, les autorités tunisiennes pour avoir «sécurisé immédiatement l’ambassade américaine». L’ambassadeur a exprimé «sa colère» contre cet acte terroriste et présenté ses condoléances à la famille et aux collègues du lieutenant mort dans l’exercice de sa mission.
«Les forces de sécurité tunisiennes ont montré un professionnalisme élevé et nous réaffirmons à ce titre notre engagement envers notre longue amitié et notre alliance avec la Tunisie contre le fléau du terrorisme», conclut le message.